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16 Déc, 2025 A la une, Communiqués

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Communiqué ADH – Réorganisation du pilotage territorial du système de santé

Réorganisation du pilotage territorial du système de santé

Une organisation pour une mise en œuvre des politiques nationales de santé, en proximité, collégiale, cohérente, dans une logique interministérielle, plus efficace encore et source de cohésion

Paris, 15 décembre 2025 – D’aucuns soulignent aujourd’hui une complexité forte dans l’organisation du système de soins et de son pilotage qui peut, du fait du manque de visibilité, du manque de compréhension des enjeux par nos concitoyens, d’une impression d’un manque de perspectives et finalement d’un manque de visibilité des actions réellement menées être source de défiance et de critiques. Alors que beaucoup d’actions sont menées. A ce manque de visibilité s’ajoutent des difficultés d’accès aux soins, de suivi des soins, encore plus marquées dans certaines parties du territoire national. Par ailleurs, on constate aujourd’hui un mille-feuilles organisationnel au plan local qui, outre sa complexité, peut être source de lourdeurs alors que des outils sont en place pour assoir un pilotage opérationnel plus efficace. On peut ici notamment citer les Comités Territoriaux de Santé (CTS), aux fonctionnements hétérogènes, ou bien encore les contrats locaux de santé, vivant de façons très différentes selon les territoires, alors qu’ils pourraient être de véritables lieux de démocratie sanitaire, de définition et de coordination de politiques au plus près des territoires. Car, enfin, alors que la crise nous avait enseigné l’importance de libérer les énergies des territoires, de prendre les décisions au plus près « du terrain », la force centralisatrice semble avoir repris place, dans un écosystème semblant souffrir d’un manque de visibilité, de définition de politiques éloignées des réalités de territoires et d’un manque marqué de coordination territoriale. Les CNR santé ont posé des premiers jalons qu’il faut maintenant amplifier. Ces difficultés de pilotage d’un système de santé alimentent une crise de confiance.

Il s’agit de constats partagés par les acteurs de terrain qui réclament un cap clair et pluriannuel qui, au regard du contexte de crise, ne peut attendre le printemps 2027. Un cap clair et pluriannuel sur l’évolution de l’accès aux soins et sur les organisations territoriales à mettre en place pour y parvenir, notamment à travers la construction de parcours gradués d’accès aux soins.

L’ADH a toujours sollicité cette clarté et l’avait d’ailleurs demandée lors du Ségur de la Santé au travers de schémas territoriaux de santé clairement établis.

Dans ce cadre, l’ADH a toujours soutenu les ARS, regrettant néanmoins l’agilité des ARH et surtout leur grande proximité, tout en soulignant la nécessaire réorganisation des ARS liée notamment à des sièges régionaux pouvant être éloignés et souffrir de difficultés de réaction rapide. L’ADH a toujours soutenu une organisation territoriale, qui ne doit pas opposer mais qui doit au contraire construire une organisation hybride de la gouvernance de la santé à la fois décentralisée et déconcentrée, rentrant dans le champ régalien de l’Etat (nécessaire au regard des enjeux de crises) et devant impérativement être appréhendée dans une approche interministérielle. On peut par exemple citer ici l’enjeu majeur de la prévention qui ne relève pas uniquement du secteur santé et qui pourrait réclamer une définition mais également une mise en œuvre interministérielle sur les territoires. Il ne s’agit pas d’opposer ARS et Préfets, mais plutôt de renforcer le travail ensemble et coordonné, et de renforcer l’échelon au sein duquel tous les acteurs méritent d’être impliqués dans un souci de coordination dans le cadre d’un projet partagé : hôpitaux, libéraux, élus, CPTS, usagers et leurs représentants… l’échelon départemental mérite alors d’être renforcé tout en tenant compte des enjeux et liens interdépartementaux et régionaux.

Il ne saurait s’agir de la suppression sèche des ARS qui ont accompagné des évolutions et au sein desquelles les femmes et les hommes œuvrent suivant les missions et les organisations définies (et qui, malgré les critiques liées à des organisations congénitales, ont amené de nombreuses évolutions) ou du retour des DDASS ou des DRASS d’une autre époque avec d’autres enjeux qui ne sont pas ceux d’aujourd’hui ; mais bien d’une nouvelle organisation que l’on peut appréhender en 3 niveaux, avec des missions qui devront être travaillées, avec une coordination tenant compte de l’ensemble des politiques publiques conduites par l’Etat.

1 Le niveau central

C’est le lieu d’impulsion de la politique de l’Etat qui veille à ce que les territoires puissent mettre en place les axes politiques définis. Sur les plans législatif, réglementaire et financier ainsi qu’en suivant les actions déployées, en veillant à une coordination et en structurant ce qui doit être porté par le niveau national (exemple de certaines autorisations comme les greffes).

2 Le niveau régional

Dans une dimension interministérielle et de coordination, le niveau régional continue à recevoir des crédits pour la mise en œuvre de la politique nationale. Cet échelon élabore et veille à la mise en œuvre du PRS. Il suit les autorisations qui sont régionales et traduit dans l’évaluation et l’évolution annuelle du PRS la structuration des schémas départementaux-territoriaux de soins. La dimension des niveaux national et régionaux est à préciser.

3 le niveau départemental

C’est aujourd’hui un constat quasi unanime : l’échelon départemental est faible avec des correspondants en compétences déléguées et en nombre hétérogènes. C’est un échelon où la diversité et la complexité des espaces de dialogue sont indéniables (CLS, CTS, CPTS, DAC, GHT et CPAM…) avec une réelle coordination à affirmer. C’est également un espace où les acteurs politiques doivent être encore plus associés. Pour la pédagogie, pour l’organisation et la déclinaison territoriale de la politique de santé mais également parce que des collectivités, notamment les mairies adoptent des CLS ambitieux et souhaitent également participer à la construction de l’offre de soins ; par exemple en construisant des maisons de santé pluridisciplinaires. Les départements sont également des partenaires pour l’élaboration de projets départementaux ou territoriaux de santé. Les liens avec les élus et leurs rôles méritent alors d’être renforcés.

Le renforcement de cet échelon implique une réelle capacité d’action et de décision, au plus près de la dynamique et des enjeux. De la même manière que le fonctionnement d’un centre hospitalier se renforce en faisant vivre les services et leurs projets avec un pilotage proche des unités pouvant même mettre en œuvre des délégations, l’échelon infra régional pourrait être renforcé en lui donnant la capacité de construire un véritable projet départemental de santé et de le faire vivre en garantissant la coordination de l’ensemble des acteurs sur la base de ce projet partagé et lisible, décliné suivant les spécificités du territoire, en tenant compte des acteurs régionaux (CHU, université et faculté) et des projets interdépartementaux lorsqu’ils existent.

Le renforcement de cet échelon pourrait également s’appuyer sur des délégations de crédits afin de garantir plus de réactivité.

D’autre part, la coordination de cet échelon pourrait s’inscrire dans le cadre d’un Groupement de Santé de Territoire (GST) dont le pilotage sera essentiel pour assurer la planification, la coordination et la visibilité des actions menées au plus près de nos concitoyens et en lien avec les élus. Le cadre de ce pilotage est à définir, afin de lui garantir à la fois l’autorité dans l’action ainsi qu’une dimension interministérielle. La mutation des GHT en GST est évoquée. L’autre piste est de renforcer le niveau déconcentré avec des compétences fortes et adaptées aux enjeux. Dans tous les cas, la mobilisation et la coordination de tous les acteurs départementaux-territoriaux seront essentielles, ce qui nécessitera des compétences spécifiques, suffisamment fortes au niveau des connaissances de l’écosystème, au niveau technique et sur le plan managérial. Le lien avec les élus locaux sera fondamental. En plus des compétences, la nomination devra assoir une légitimité source d’autorité.

Pour attirer et mobiliser ces compétences spécifiques (administrateurs d’Etat spécialisés en santé à partir du 1er janvier 2026), il conviendra de proposer des postes attractifs, c’est-à-dire offrant a minima des compétences socles de cet échelon : définition de politiques – projet départemental de santé, coordination des acteurs… Une réelle capacité d’action et de décision.

Si l’on évoque des compétences larges, celles-ci seront exercées dans le cadre d’un double rapport d’autorité : hiérarchique avec l’échelon régional (on évoque aujourd’hui des directions régionales de la santé), et fonctionnel avec les préfets de départements.

Par ailleurs, dans le cadre de l’organisation hospitalière, l’ADH a depuis des années défendu l’an II des GHT. Les évolutions (directions communes, fusions, personnalités morales) seront nécessaires.

Le pilotage départemental et territorial sera structurant.

Cette coordination et ce pilotage regrouperont tous les acteurs du système de santé. Il conviendra alors de renforcer, de muscler les structures de démocratie sanitaire, les CTS, qui auront un poids à la fois politique et professionnel pour aborder et définir les vrais enjeux des territoires.

A travers ce renforcement du niveau départemental et territorial, il conviendra de pouvoir favoriser les innovations. Il convient alors de souligner le risque d’immobilisme que peut engendrer le régime de responsabilité des gestionnaires publics. Afin de garantir la sécurité des acteurs santé et de l’échelon départemental renforcé, la protection fonctionnelle devant les juridictions financières est fondamentale.

Ainsi, les propositions que l’ADH porte sont les suivantes :

  • Renforcer l’échelon déconcentré en santé : avec des capacités décisionnelles, sur la base d’un socle de compétences clairement établi ; avec des crédits pouvant être ventilés à cet échelon et avec la mission de construire un projet départemental de santé, en déclinaison de la politique régionale, mais également dans une logique interdépartementale. La construction sera portée en lien avec les élus, notamment les présidents de départements et les maires. Le comité territorial de santé, qui pourra s’appuyer sur une coprésidence Etat-élu-professionnel aura à la fois une dimension politique et professionnelle et traitera des questions structurantes.
  • Renforcer la place et la cohésion des GHT, et leur rôle dans la construction de l’offre de santé.
  • Placer cet échelon départemental santé sous l’autorité hiérarchique de l’échelon régional et sous l’autorité fonctionnelle du préfet de département afin de favoriser l’interministérialité.
  • Recruter des compétences expertes, tant sur le plan de l’expérience, des connaissances du monde de la santé et des compétences managériales pour piloter l’échelon santé déconcentré, au sein d’un vivier d’administrateurs d’Etat. Afin de garantir la légitimité de ces directeurs de GST, des nominations en Conseil des ministres pourraient être envisagées.
  • Accorder la protection fonctionnelle devant les juridictions financières aux gestionnaires publics pour favoriser l’innovation et éviter l’immobilisme.

 

Vincent PRÉVOTEAU, Président, le bureau et les membres du conseil d’administration de l’ADH